(38) IsèreJazz Club de Grenoble

18/01/2018 – Koum Tara au Jazz Club de Grenoble

Ce jeudi 18 janvier 2018, le jazz Club de Grenoble invitait Koum Tara, formation que nous avions déjà entendue il y a quatre ans, dans le cadre du festival d’automne de jazz de Grenoble.

Koum Tara, c’est, pour simplifier, un quartet façon jazz, avec Karim Maurice (Piano, claviers, arrangements, direction artistique), Kamal Mazouny aux percussions, Brice Berrerd à la contrebasse et Sid Ahmed Belkier à la mandole et au chant ; quartet en symbiose avec un quatuor à cordes : Amandine Lefevre au violoncelle, Gaël Rassaertet et Mathieu Schmaltz aux violons et Jean-Baptiste Magnon à l’alto.
La possibilité pour le quartet  et le quatuor, de jouer ensemble est d’abord due aux arrangements de Karim ainsi qu’à son désir, et à l’existence de l’ensemble à cordes Camerata du Rhône dont provient le quatuor à cordes, sous la direction de Gaël.

Bien sûr, la coexistence d’un quatuor à cordes de formation classique, aux côtés d’un quartet dans lequel la traditionnelle batterie est “remplacée par un percussionniste formé aux rythmes du Maghreb, et d’un joueur de mandole, cultivant cette musique populaire née à Alger au début du vingtième siècle, (qu’est) le Chaâbi algérien” conduit inévitablement le “puriste” à poser la question de savoir si c’est du jazz que nous avons entendu. Plusieurs réponses sont possibles. La première consiste à dire que la présence de Brice Berrerd, un authentique jazzman aux côtés de Karim Maurice dont la formation jazz (mais pas seulement) est déjà un témoignage éloquent : si le jazz fait partie des musiques improvisées, nous avons bien eu  droit à d’authentiques improvisations de ce côté-là et à de fort belles et originales ; Karim est un pianiste talentueux et singulier, Brice un excellent improvisateur.

 Et puis, deuxième réponse, l’ensemble Camerata a été créé pour s’ouvrir à d’autres sources musicales que la musique dite classique ou moderne, comme la composition contemporaine, le tango ou la musique de Broadway. Enfin, faut-il vraiment enfermer le jazz dans quelque canon daté et indépassable ? Cette querelle vieille comme le jazz peut largement être dépassée, puisque l’histoire même de cette musique montre que le jazz n’a jamais voulu s’enfermer dans quelque page historique et canonique, et puisqu’à l’instar de toute forme de création artistique, la liberté est son maître mot. L’ouverture de cette musique aux autres formes musicales, sa capacité de dialogue voire d’intégration avec toute forme de création musicale est une de ses constantes.

Abandonnons l’ennuyeuse question aux “critiques”, et laissons nous porter par la beauté des inventions magnifiques de Karim, ses arrangements splendides et le jeu plein de cœur et de talent des musiciens de Koum Tara.

 Alors lorsque Sid Ahmed Belkier chante un thème comme  Tlou Mouni  ou J’ai quitté mon pays (Enrico Macias) tissé avec Ya Taleb, nous devenons sensibles, par la douceur de la voix d’adolescent de Sid Ahmed, mariée à la mélodie de la mandole, au  déracinement déchirant d’un peuple : il renvoie au déracinement universel de l’humanité en perpétuel exil. Et la musique peut nous consoler. C’est ainsi que nous avons pu apprécier, (avec un public qui fera à l’ensemble une “standing ovation”) :  Koum Tara (thème créé par Karim et titre éponyme du Groupe et du CD) Mazed, haboob, Tlou mouni, Ya Kalek ? Ya Lhadra, Alik Belama

Il y a quatre ans, Koum Tara avait navigué dans toute la région du Rhône-Alpes, de la Drôme, de la Savoie, etc…  Aujourd’hui ses interventions se font dans le monde entier. Karim rafle un prix de composition à New York ( qui dira que le jazz new-yorkais est refermé sur lui-même ?)
Pour conclure, je ne peux m’empêcher de citer à nouveau Karim Maurice : “A l’heure où l’humanité, le respect des cultures et la tolérance apparaissent comme des valeurs essentielles à la construction d’un monde meilleur, ce spectacle offre un moment musical unique où chacun apporte à sa construction son identité, son patrimoine culturel et son originalité pour chanter l’amour universel”.

Ont collaboré à cette chronique :

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