La canicule se termine enfin. Les orages épars ont bien arrosé le Trièves. L’atmosphère est maintenant calme, respirable, pour le public régional et vacancier installé debout ou à table autour de la salle des Sagnes à Mens.
Pour cette quinzième édition, le festival Mens Alors ! propose une pépite du jazz actuel : Thomas de Pourquery. Il a sorti l’album « Play Sun Ra », avec le sextet Supersonic, élu meilleur album jazz de l’année en 2014 ! En 2017, Thomas est récompensé comme artiste de l’année aux Victoires du Jazz !
Ce soir, il nous emporte « dans l’espace intersidéral avec son vaisseau Supersonic : du jazz, du groove, du rêve » !
L’entrée en matière est tonitruante, tonique ! Thomas au sax alto échange avec Sylvain Bardiau à la trompette sur un rythme très cadencé. La batterie déménage ! Le ton est donné ! De longs fuseaux de lumière bleue tournoient. Sur un long solo au sax alto, Thomas, puissant, emmène le groupe dans sa folie. Le public n’attend pas la fin du morceau (Mermaids, extrait du dernier album « Sons of Love ») pour applaudir à tout rompre. C’est chaud, déjà !
Quelques piaillements, le bruit de l’eau qui coule, le souffle du vent brûlant illustrent tout à fait We Travel the Space Ways de Sun Ra. Edward Perraud à la batterie court avec fébrilité. Le chant des soufflants, doux, intime, nous invite au voyage. Soudain, Arnaud Roulin au piano frappe fougueusement son clavier tandis que l’ensemble, petit à petit, explose. Thomas chante maintenant d’une céleste voix. C’est alors que le groupe, déjanté, s’excite avec fulgurance. Les lumières blanches et rouges s’entrecroisent prestement.
Sur Slow Down, Frédérick Galiay joue de l’archet sur sa basse, rejoint par la trompette qui sifflote. Le souffle long des sax accentue le calme. Les paroles deviennent de plus en plus affirmatives, impératives même. Le public se balance.
Le sommet de la soirée est atteint avec Present Eternity, un autre titre de Thomas de Pourquery extrait du dernier album.
L’introduction au piano est claire, mélodieuse, profonde. La trompette introduit les sax. Les soufflants clament leur chant avec force. La batterie s’enthousiasme avec ardeur. Puis Thomas, seul au sax alto, accompagné uniquement de la batterie, s’acharne. Galopant, vociférant, tous deux entrainent la salle. Mais la batterie ne se laisse pas mener. Une vraie battle ! Le combat du Présent contre l’Eternité ? Le groupe les rejoint, enthousiaste ! Les spectateurs les acclament !
Pour Sons of Love, les mains accompagnent le battement des cœurs. Fabrice Theuillon au saxophone ténor se déchaine, en compétition avec le piano, la batterie et la basse. Il fixe ses regards vers la batterie sur un tempo très marqué, pour un solo resplendissant. Le public laisse éclater sa joie !
La soirée se poursuit pleine d’allégresse, de vibrations, d’incantations avec la participation des festivaliers de Mens Alors ! qui a rempli la salle comme un œuf.
Ce ne serait pas du jazz sans les amis musiciens qui sont venus célébrer la performance de ce soir. Csaba Palotaï, à la guitare électrique, monte sur scène pour Revolutions. Au rappel, il sera rejoint par Sylvain Rifflet au saxophone ténor, rapide, exubérant, pour Rocket Number Nine de Sun Ra. Dans une ambiance déjantée, la batterie se défonce, la basse est stridente, les sax secoués, le batteur hoquetant.
Le concert se termine avec Love in Outer Space, toujours de Sun Ra. Le sax ténor et la trompette encadrent Thomas au chant tandis que la rythmique chantonne. La trompette se fait tendre, les sax se balancent, la voix devient langoureuse, le piano roule….
Une pure séduction qui n’a laissé personne indifférent !