C’était il y a quelques années, au détour d’une randonnée dans nos montagnes dauphinoises que j’ai écouté Shai Maestro pour la première fois.
Plus précisément à Presles, invité qu’il était par Ezio, le valeureux organisateur de ce petit festival confidentiel qui n’existe plus.
Je découvrais alors l’enfant prodige du piano et l’accompagnateur précoce de grands du jazz comme le contre bassiste Avishai Cohen, qu’est Shai Maestro.
Ce génial pianiste si attachant m’a tout de suite séduite.
C’est dire si je suis heureuse de chroniquer le concert qu’il a donné ce soir en solo à Primarette, dans le cadre de Jazz en Bièvre consacré cette année au piano.
Avec son sourire irrésistible, il nous a fait croire qu’il ne savait pas ce qu’il allait nous jouer, mais c’est avec une aisance prodigieuse qu’il nous a embarqués pour un moment de grâce.
Shai Maestro prend son temps. Il s’installe, laisse la musique se dérouler. Ses notes le guident, l’inspirent, d’où son talent immense pour l’improvisation. Son jazz semble méditatif et empreint de sérénité, ce qui n’empêche pas une créativité, une virtuosité et des tournures rythmiques acrobatiques.
Sa formation classique et son goût précoce pour le jazz sont perceptibles dans ses compositions aux harmonies limpides, lyriques: Angelo, Mystery and Illusion, From a soul to another magnifique de générosité et d’émotion, Painting inspiré d’un tableau de Marc Chagall qu’un ami lui a offert.
La fluidité de sa musique va de paire avec l’ondulation de son corps autour du clavier, avec sa voix qui parfois accompagne ses notes.
Son talent est mis aussi au service d’autres pièces comme celle de Charlie Chaplin Smile, ou des Beatles Norwegian wood, ou All the things you are. Jouant avec les cordes du piano qu’il fait résonner, il se réapproprie Nature boy de Nat King Cole, magistralement.
Rappelé une seconde fois, c’est avec Les feuilles mortes que Shai Maestro partage une dernière fois avec le public plus qu’enthousiaste, un moment de générosité musicale, et de bonheur partagé.