Super combo et gombo sauce électro
Grand retour pour nos afrofunkers lyonnais qui seront incontournables dans les programmations des mois à venir en attendant un troisième album qui se teintera plus d’électro, comme en témoignent quelques nouveaux titres livrés par le septet au complet lors d’une soirée club session qui a embrasé le dance floor du Toï Toï.
C’est toujours un grand plaisir que de retrouver la sympathique équipe de Supergombo et le concert donné vendredi au Toï Toï de Villeurbanne ne pouvait que parfaitement boucler une semaine très afro après Fatoumata Diawara et surtout, par un bel hasard, dans la foulée de Fémi Kuti et son Positive Force, l’afrobeat de Fela et du mythique Nigerian’70 étant l’une des grandes sources où s’est abreuvé dès sa constitution notre super combo lyonnais emmené par le bassiste Etienne Kermac. Une soirée club session plus que chaleureuse -on peut dire ultra bouillante- dans l’intimité d’un petit lieu où les musiciens sur scène sont en prise directe avec le public qui a un peu tardé à arriver (entraînant un démarrage décalé de quarante minutes) mais qui a fini par remplir l’antre villeurbannaise vite transformée en sauna.
«C’est un test ce soir, car si ça fonctionne bien nous aimerions renouveler le rendez-vous de façon régulière ici, comme c’est le cas par exemple avec les Bigre! dance partys» m’explique Etienne pour lequel ce type d’exercice permet de «tenter des choses, faire des crash-tests». Comme notamment ce soir nous jouer pour la première fois quelques tout nouveaux titres qui figureront sur un prochain album à compléter encore. «Contrairement à d’habitude, on veut se servir de ça, de ces sessions live préalables pour aller ensuite en studio, plutôt que d’adapter un album formel à la scène» poursuit le bassiste fidèle à sa jazz-bass Fender de 73 qui a visiblement beaucoup de vécu au regard de son état (comme d ‘ailleurs la guitare de son compère Francis Larue avec lequel il partage aussi l’aventure Cissy Street…).
Rodage… à fond
Mais contrairement à une voiture qu’il ne faut pas pousser dans les tours quand elle est encore en rodage, Supergombo qui n’est pas habitué à la demie mesure nous les livrera ce soir avec la même intensité démoniaque que le reste du répertoire comptant bien sûr une dizaine de titres issu de leurs deux excellents albums précédents, l’inévitable Explorations puis Sigi Tolo paru en 2020, une fable futuriste dans l’esprit du space-funk seventies avec ses delays et autres reverbs spatiales, dont les arrangements ont été signés par Vincent Taurelle (Oumou Sangaré, Tony Allen). Une touche particulière appuyée désormais pour les nouveaux titres à venir -dont les quatre joués ce soir- par l’insertion d’un zest d’électro du meilleur effet notamment via le Fender Rhodes et les claviers vintage de Romain Nassini et l’utilisation par Etienne d’un synthé basse. Des effets qui se marient parfaitement avec l’afro jazz-funk incandescent qui fait la réputation du groupe au son monumental et au beat de dingue fourni par la frénésie percussive à la fois du batteur burkinabé Wendlavim «Vim» Zabsonré et du percussionniste réunionnais David Doris. Qui dit afrobeat dit évidemment cuivres et le solide duo composé de Guillaume Pluton à la trompette et Jérôme Bartolomé au sax apporte sa fatale contribution à cet aller simple vers la transe en multipliant chacun leur tour des chorus enflammés en front de scène.
Vim l’ambianceur
Si la plupart des compos de Supergombo sont instrumentales, on y chante parfois sous la férule de Vim l’ambianceur qui joue les MC et se lève régulièrement de sa batterie baguettes en mains pour entonner des refrains très afros qu’il incite le public à reprendre dans un joyeux partage. Le rythme ne faiblit jamais pour finir le premier set d’abord avec le baptême du morceau Takip qui signifie poursuite en turc, et l’on comprend pourquoi en entendant cette cavalcade rapide comme une course en avant, très cinématographique tel une B.O., dont Etienne m’avoue justement qu’elle lui a été inspirée par un fameux film de Christopher Nolan avec une mémorable scène de poursuite. Si les cuivres y ont un son qui rappelle les westerns mexicains, avant un solo d’enfer de la trompette, le spectre s’élargit pour finir le premier set par un titre où toutes les percus virent d’abord à la batucada brésilienne avant de nous entraîner dans un tourbillon de groove electro-funk porté par le jeu de molette sur le synthé vintage et les rafales de guitare sous effets de pédale wah-wah.
On parlait des dance partys de Bigre! précédemment, c’est bien le même esprit infernal et festif qui prévaut ici tandis que les spectateurs transforment le parterre en dancefloor pour perpétuer la fête tout au long du second set où les morceaux vont s’enchaîner sans aucun répit portés par la frappe inouïe de Vim confronté à celle de David et la basse tachycardiaque d’Etienne. Si ce dernier me parlait de «crash-test» avant d’entamer le concert, on peut affirmer que le test est plus que probant, sans crash ni clash. On y aura plutôt été scotchés comme vous pourrez sans doute le constater prochainement puisque Supergombo qui passe désormais par une petite agence parisienne de booking affiche une quinzaine de dates à venir et notamment lors de festivals estivaux comme le prochain Woodstower à quelques encablures d’ici au parc de Miribel Jonage. Sinon, sûrement dans de futures Supergombo’s club sessions au trop cool Toï Toî.