(38) IsèreJazz à Vienne

09/07/2022 – Yann Tiersen au Théâtre Antique

Après des études classiques de piano et de violon commencées très jeune, à l’adolescence, Yann Tiersen a brisé son violon et s’est offert une guitare pour faire du rock (voir son site, seulement en anglais). Après divers groupes et déjà des collaborations avec le théâtre et le cinéma, un premier succès, une chanson : Monochrome chantée par Dominique A en anglais, sur l’album de Yann Tiersen Le Phare qui se vend bien. Avec l’album (2000) qui regroupe les musiques utilisées pour “Le fabuleux destin d’Amélie Poulain” c’est le gros carton mondial avec 2 000 000 d’albums vendus. En 2003 il dirige un orchestre symphonique pour enregistrer les dix-huit titres du film “Good Bye, Lenin!” A partir de 2010 et l’album “Dust Lane” les sons électroniques envahissent sa musique.

On comprend que dans l’esprit du public, le nom de Yann Tiersen soit le plus souvent associé au cinéma. Il nous montrera ce soir que son œuvre est plus vaste que ça. Mais le rapport au jazz me direz-vous ? Sincèrement, j’ai renoncé à chercher, peut-être en passant par le rock, on devine une parenté avec l’esprit du jazz, la recherche de l’expression, l’improvisation… Tiré par les cheveux ? oui, sans aucun doute.

Le concert de ce soir était basé sur l’avant-dernier album “Kerber”, dont certains titres ont été profondément remaniés sur le dernier opus 11 5 18 2 5 18.

Contrairement au cinéma ou les musiques sont choisies en fonction des images, dans ce concert unique, les projections visuels et vidéos de l’artiste multimédia Sam Wiehl, sont suscitées par la musique.

Avec la musique de ce concert on parcourt l’île d’Ouessant. La musique large et profonde suscite des images qui évoque l’écume, la puissance océanique qui vient s’écraser sur le granit des côtes. L’écran transparent placé devant la scène se combine avec l’écran de fond de scène offrant une troisième dimension aux projections. Le mouvement suit le tempo qui évolue en fonction de l’espace exploré. Des personnages de sable et d’eau se torde au cœur des vagues sublimes, on songe à cette vieille chanson réaliste qui s’interroge sur le sort des marins perdus en mer. Un homme semble-t-il, poursuivi par la vague court,  le cœur cogne de plus en plus vite. Les formes bleues deviennent rouges et tout explose. Des cris d’oiseaux, le bruit du vent. On est un peu surpris par les formes géométriques en 3D qui envahissent l’espace visuel, sans grand rapport avec la musique, si ce n’est la vitesse de passage. Au début elle est réglée sur le mouvement de la musique, puis, sans véritable lien avec le tempo, la vitesse de jaillissement des images s’accélère. L’imagerie est parfois plus perturbatrice qu’accompagnatrice dans son rapport à la musique. Des moments de poésie pourtant dans cette musique. Si comme on me le fait remarquer, l’intervention humaine est perceptible au travers de la modulation des sons et de l’utilisation du pichbend (variation des sons en continu et pas par demi-ton), cette remarque d’initié n’est pas forcément valable pour l’ensemble du public dans lequel nous nous situons. Il est difficile pour ce public d’interagir avec un musicien qui n’est qu’une ombre et avec une musique qui paraît se dérouler en pilote automatique.

Impossible de savoir si la remarque à haute voix dans un silence entre deux morceaux, d’un spectateur qui s’ennuie change quelque chose, mais à partir de là, la musique semble s’animer pour les trois derniers morceaux et sur le dernier, Yann Tiersen transformé en super DJ fait un peu réagir une partie du public, certains allant même jusqu’à danser devant la scène ; diantre !

Ont collaboré à cette chronique :