(69) RhôneENM

31/01/2023 -Atelier 3ème cycle de l’ENM de Villeurbanne “Histoire du jazz”

Atelier 3ème cycle de l’ENM de Villeurbanne (dirigé par Pierre Baldy-Moulinier) : programme autour de l’histoire du jazz

Départ pour le théâtre l’Astrée de Villeurbanne. Je branche la radio dans la bagnole. C’est une maison bleue. Choc temporel. Paroles de paix. A France culture, c’est la grève. Normal. C’est rassurant. Dans un réflexe, je mets aussi sec le dernier disque d’Emmanuel Bex. Il joue la Marseillaise, légèrement décalée : « qu’un son pur accorde nos violons ».

Non décidément la musique n’est pas ce truc fade et sans saveur détaché des réalités matérielles et historiques. C’est un véhicule, durable, éponge captant les soubresauts de la société. Tout comme avec l’atelier de 3ème cycle de l’École Nationale de Musique de Villeurbanne, qui présentait une histoire du jazz en huit tableaux. Une succession de cool et de hot jazz. Cool comme un semblant de désinvolture dans l’air du temps, hot quand il faut défendre ses droits.

Ça raconte ça, l’Histoire du jazz, et c’est un brin plus complexe :

De la nouvelle Orléans où le brassage des cultures favorise l’émergence d’un nouveau son, un cri d’émancipation, à la recherche d’une reconnaissance avec les grands orchestres d’Ellington, de Fletcher Henderson, quand il faut jouer des coudes avec le bebop des années 40. Du cool de la West Coast au free et au hard bop qui lui succéderont, de la modernité avec le jazz électrique, le jazz fusion et les multiples branches qui se déploient depuis, tout n’a été que conflits, détente, poussées identitaires, solidarité entre musiciens ou concurrence, avancée de la justice pour les noirs et reculs sévères.

Le jazz est le reflet de ces luttes. Comme le dit le philosophe Bruno Latour, rien ne sert de chercher les fondements, autant s’intéresser à ce qui advient. Tout est mouvement. Pas de substance, ce qui serait sous le réel, juste le réel changeant.

Ce mouvement admirablement mis en scène par les musiciens de l’atelier qui ont successivement joué I’ll fly away (New Orleans), Black and tan fantasy (Duke), Eechoes of Harlem (Duke), Anthropology (Parker), Whisper not (Golson), Speak no evil (Shorter), Hang up your hangs ups (Hancock), Utviklingssang (Bley).

L’orchestre est à l’aise dans tous les styles. Il y a de la place pour l’expression de chacun. Les arrangements sont peaufinés, le texte dit par Pierre Baldy-Moulinier, improvisé est très juste. Travail accompli, improvisations à la hauteur, chaleur du son, propos ancrés dans le réel, une fois de plus la musique joue sa fonction “d’entertainment” et son rôle politique. Bravo aux musiciens-musicienne. A réentendre le 14 mars au périscope avec d’autres ensembles de l’E.N.M. de Villeurbanne.

Pierre Baldy-Moulinier : direction, textes, trompette, bugle ; Joséphine : clarinettes ; Guillaume :sax alto ; Julien : sax ténor ; Mickaël : piano ; Edouard : guitare ; Antoine : contrebasse, basse ; Solal : batterie

Ont collaboré à cette chronique :