Anne Paceo est une leadeuse, batteuse et compositrice féconde, auréolée de multiples récompenses. Elle a dit à propos du jazz : « Il faut donner une autre image à cette musique. Ne pas faire peur, mais revenir à l’essence : le jazz est liberté, liberté de jouer et d’être ce que l’on est dans l’instant présent » .
Cette liberté qui lui est si chère, elle l’a pleinement trouvée en acceptant ce projet d’accompagner en musique le film « culte » de Robert Flaherty : “Nanouk l’Esquimau”.
Dans la fosse créée à cette occasion, Anne Pacéo à la batterie et à la voix, Laura Perrudin à la harpe et à la voix et Gauthier Toux au piano et claviers, accompagnent en direct le film projeté.
Ce film est culte parce qu’il est considéré comme un des premiers films documentaires. Il est sorti en 1922, après six ans passés par Robert Fhaherty parmi ces Inuits de la côte est de la Baie d’Hudson : « Je voulais montrer les Inuits. Et je voulais les montrer, non pas du point de vue de l’homme civilisé, mais comme ils se voyaient eux-mêmes».
Nanouk (l’ours) et sa famille sont les personnages que nous suivons au fil des saisons, en lutte permanente pour survivre dans cet enfer blanc. Mais Nanouk est un héros débrouillard et attachant dont le beau sourire réchauffe tous les plans enneigés du film.
La musique aussi nous réchauffe par son inventivité, mêlant jazz, électro et voix composant ainsi une trame originale qui donne le rythme et met en valeur les images.
Cette petite famille, vêtue de peaux de renards, d’ours, très démunie mais joyeuse, a pour principale préoccupation la recherche de nourriture.
La musique ponctue chaque épisode de cette vie de nomade, mettant l’accent sur la dramaturgie des situations vécues
La découverte d’un gramophone, quelle surprise et quelle rigolade d’entendre une voix sortir de cet appareil ! La musique se fait joyeuse et drôle.
Mais quand la banquise bloque les esquimaux qui risquent de mourir de faim, la musique est inquiète. Elle redevient joyeuse lorsque Nanouk a réussi à pêcher des saumons sous la glace.
Anne interprète d’ailleurs de sa voix claire une très belle chanson Tant qu’il y a de l’eau, dont les paroles sont de Claire Cahen.
La lutte permanente contre les éléments, la bagarre pour capturer un morse, l’extrême difficulté à sortir un phoque de dessous la glace, en font un film d’aventures dans lequel la musique répétitive, lancinante, triomphante marque le suspense, la peine, la victoire.
Malgré la rudesse de leur vie, une certaine douceur s’infiltre lorsque Nanouk sculpte un animal de glace pour apprendre le tir à l’arc à son enfant, quand la Maman sort son petit qu’elle porte au chaud dans son dos pour le laver, que toute la famille participe allègrement à la construction de l’igloo, ou que cette même famille se blottit sous les peaux pour un sommeil bien mérité.
La musique nous a invités à la contemplation de ces paysages glaciaux et silencieux, tout en illustrant les épisodes amusants, rudes, familiaux et poétiques de cette attachante famille d’inuits.
Symbiose du chaud et du froid, que ce ciné-concert !