Vous trouvez l’actualité morose, le monde cruel, et votre moral traverse de gros orages, de lourds nuages, des pluies à n’en plus finir ?
Vous pouvez toujours passer une soirée au Jazz club de Grenoble, un soir comme ce jeudi 9 novembre pour vous réjouir d’un quintet Charley Stomp jubilatoire, entrainant, joyeux et léger comme le jazz des débuts du siècle précédent savait l’être avec son énergie débordante et son sens de la fête.
Charley Stomp, c’est depuis longtemps (1973!!!) un groupe de musiciens amis qui sait se renouveler quand les temps l’exigent ! Et le décès d’une des leurs (Jean-Pierre Vidal à la clarinette ne sera pas remplacé ce soir, et jamais. Qui lui succèdera ?) l’âge aidant (quelle expérience depuis plus de cinquante ans de concerts!, et le renouveau du répertoire -de nouveaux arrangements écrits par Yves Curtoud, tromboniste devant l’Eternel- font bouger les lignes en effet, et ça bouge, ça danse, …ça swingue doo wap doo wap doo wap (le dernier titre du premier set, le célèbre It don’t mean a thing de Duke Ellington.
Nous avons en effet revisité la période du jazz allant de la Louisiane et Nouvelle Orléans des années 1900 à la seconde guerre mondiale et les célèbres orchestres de Duke et Count Basie, à grand coups d’informations “savantes” sur les créateurs de cette époque (Yves et Pierre Fort le trompettiste rivalisent de citations et de facéties, à grands coups de cymbales et caisse claire (Marcel Riondet à la batterie, de slap (parfois, mais le plus souvent walking) -contrebasse d’Olivier Lesaint et de battements décidés, cardiaques, souriants d’une grande variété de renversements harmoniques de la main droite de Myriam Lemaire au banjo (baï zoum baï zoum baï zom baba);
Et ça commence avec Bill Bailey de 1902 Won’t you please come home (une histoire un peu alcoolisée sans doute). Ça y est l’ivresse de la musique vient ! Alors Crazy rythm ne vas pas arranger notre affaire…et nous allons poursuivre l’aventure avec All of me, The wrong you’ve done to me (il faut bien régler ses comptes). Plusieurs titres évoquent des “réalités” souvent passées sous silence et que le bon goût réprouve : du politiquement incorrect ! Moten swing… Ah! Le boogie et le rag de Bennie Moten précurseur, avec Fletcher Anderson, des big-bands du Count et de Duke!
Bref le Charley Stomp va chercher des thèmes moins connu pour étoffer son répertoire, et c’est bon pour les oreilles et l’envie de bouger: I’m gonna sit right down and write myself a letter, China boy, Blues my naughty…
Et Bernard à la photo, vise, ajuste, flashe ! Shoote! et se déplace au grés des chorus ! Tous les musiciens prennent et donnent du bonheur à jouer ! Ça tourne bien !
Yves a peaufiné les “seconde voix” au trombone pour soutenir harmoniquement la mélodie exposée à la trompette. La batterie fait les introductions (et des chorus pleins d’humour) quand ce n’est pas le banjo: Shout em Aunt Tillie, Coney Island washboard, The Mooche (ah! le caractère suggestif de cette musique, avec la sourdine au trombone et à la trompette, je le vois tituber, traîner, se déhancher le pauvre, le clochard, l’homme des rues démantibulé et ivre! Caravan, Histoire de Faussaire, et en rappel Yes sir, that’s my baby. Myriam chante! “mais c’est qu’ils m’ont forcé”! Humour bien sûr!
Nous n’allons pas nous dissoudre dans la joie, pas plus que dans la tristesse…Et pauvre de moi, riche d’émotions, suis ramené au jazz club grenoblois de mes quatorze ans, avec les Mélo-Thérapeutes, mon père et quelques amis d’enfance…découvrant ensemble le jazz, ses diableries, ses trucs, ses codes, et surtout sa joie et sa vitalité…