chronique de CD

“Dieu Poulet” par The Very Big Experimental Toubifri Orchestra

La pochette du nouvel album “Dieu Poulet”, de The Very Big Experimental Toubifri Orchestra (Le Toubifri pour les intimes) semble nous emmener dans un monde féérique où il y a des personnages avec une tête d’animal, un dinosaure, une licorne et des chimères ! Les titres Les anciens humains Lune ; Le sexe ! et un Dieu Poulet titre éponyme du CD, évoquent cet imaginaire composé d’un bestiaire digne de l’arche de Noé du XXIème siècle. Le disque, gravé en 2020, ne ferait-il pas référence à la période de pandémie que nous avons vécu l’année dernière ? [NdlR : et qui se poursuit] Surtout à ce phénomène de l’anthropocène qui prend une accélération fulgurante et par lequel l’homme commence à compromettre sa propre humanité et la planète qu’il emprunte à ses enfants? Les chansons Le costume et Les anciens humains en sont-elles les porte-paroles et l’illustration ? C’est dans l’écoute que l’on découvre une interprétation, ou peut-être son interprétation.

Toujours très précis au niveau de l’harmonie, le big band met en avant la puissance du collectif sans oublier son grain de folie habituel. On retrouve les envolées lyriques et énergiques des dix-huit musiciens plus deux membres supplémentaires. Les morceaux alternent puissances (avec un “s” à la fin) du jazz avec la pêche du rock et les ballades sensibles. Toujours avec cette proximité du délire et de la fusion de l’album “The Grand Wazoo” et du style de Franck Zappa. Les cuivres poussent toujours aussi fort ce souffle de liberté sur une rythmique solide et assurée qui soutient les morceaux punchy. La rythmique riche de tonalités permet aux cuivres de flotter et nous envoûter avec douceur sur les ballades. Pour Lune par exemple, sur lequel se mêlent délicatement le vibraphone, les percussions et divers carillons avec les saxophones et la clarinette basse.

Cinq titres sont chantés sur les dix pistes de l’album, dont certains en français et d’autres en anglais, et d’une longueur variable de plus ou moins longues à très courtes. Est-ce une envie de poursuivre dans l’univers vocal comme sur le premier album “Waiting in the toaster”, et de développer suite au deuxième album “Nous” réalisé en collaboration avec le chanteur Loïc Lantoine ? Pour ce troisième opus, nous sommes prévenus : “Et quand tout le monde chante, ça fait des cœurs !”, annoncent-ils sur la pochette. En tout cas, les textes démystifient des sujets sérieux, ou comment être sérieux sans se prendre au sérieux ! Il nous reste à retrouver le Toubifri en concert pour aller chanter en “cœur” ces nouvelles pépites.

Les musiciens n’auront pas perdu leur envie et leur énergie durant l’année compliquée de 2020. Il nous reste à souhaiter que l’on retrouve tout cela sur scène. Parce que “We are freedom, we are Toubifri !” clament-ils en chœur sur la pochette en dédiant ce troisième disque à Grégoire Gensse. Si certains donnent des leçons de vie, voire sont donneurs de leçons, le collectif du Toubifri nous donne plutôt une leçon de vivre, de vivre avec liberté. En cela, ils n’ont pas changé, mais en cette période difficile de confinement cela prend beaucoup de sens. C’est aussi une farouche envie de revivre pleinement, le vrai, le live, le vivant.

Prochaines dates annoncées sur leur site, à vérifier selon l’évolution de la situation sanitaire :

  • Du mardi 1er juin au vendredi 4 juin 2021, Opéra de Lyon, Lyon, France
  • Samedi 19 juin 2021 Espace Paul Jargot à Grenoble, Grenoble, France
  • Samedi 5 septembre 2021 Les détours de Babel – Barraux, France

Ont collaboré à cette chronique :