Issue de la scène musicale des rues et des bars du clapas montpellierain, reconnue par le monde du blues hexagonal qui lui a décerné le prix révélation au Tremplin Blues sur Seine en 2017, quelques singles et un EP sous le nom de Just in Blues Band en 2016*, la chanteuse maintenant trentenaire Justine Blue a pris le temps de peaufiner son véritable premier album “True” (We Need Love Production) en s’appuyant sur des compositions léchées et une équipe étoffée de musiciens (une douzaine avec cuivres et choristes) ; en complément derrière les consoles et à la production en véritable catalyseur du projet vient s’ajouter le magicien du son, Neil Conti ex-batteur du groupe anglais Prefab Sprout et de David Bowie.
Dès la première écoute, il apparait évident qu’on navigue bien au-delà du blues vers les rivages de la soul, du rythm’n blues, avec même une pointe de jazz, de funk et même de rock ce qui signe toute l’ambition et la richesse du projet ou on ne trouve pas de points faibles et de répétitions dans les treize morceaux que propose l’album (onze compositions originales et deux reprises) .
L’album s’ouvre sur True le titre éponyme qui révèle toute la richesse de la voix de Justine, ici chargée d’émotions et de déchirures comme chez les plus grandes chanteuses de jazz pendant que s’installe une dense partie musicale et des chœurs qui s’élèvent délicieusement. C’est très original et prometteur pour la suite… It’s not about you démarre comme une ballade avant de s’enflammer progressivement comme dans les grands titres souls d’Aretha. Gold in hour hands sonne comme un classique alors qu’il s’agit d’une composition originale, ça groove cool alors que surgissent d’impeccables riffs de guitare et des chœurs pétillants. Sur Talk about it, les cuivres sont de la partie autour d’une voix claire et entrainante et des claviers qui savent se faire discrets ; un véritable travail d’orfèvres.
Avec What am I to do, on est dans un registre de ballade tout en retenu qui trouve son piquant dans de belles parties de guitare et toujours la voix de Justine avec un phrasé impeccable et de belles modulations. Difficile de ne pas penser à Amy Winehouse accompagnée des Dap-Kings, sur It makes me fee alright, avec les cuivres qui prennent une place de choix pour faire s’envoler la voix de Justine vers les hauteurs. Les cuivres sont toujours en avant sur Rock me baby une composition très tonique également transcendée par des riffs heurtés de guitare et une voix carrément soul tournée vers les profondeurs et noirceurs de l’âme. Sur Bye bye big bad blues, on est dans un registre carrément rock blues sous influence boogie à la Z.Z. Top, avec juste une guitare, une batterie et une chanteuse qui semble improviser derrière cette puissante rhythmique.
Viens ensuite le temps des deux reprises : d’abord avec Willie and the hand jive à l’origine une composition de Johnny Otis popularisée en 1974 par Eric Clapton sur l’album de sa résurrection après quelques années d’errance, 461 Océan Boulevard. Justine Blue fait ici un véritable travail de réappropriation du titre beaucoup plus tonique que la version « laid-back » de Clapton. C’est ensuite le tour de Yellow Moon des Neville Brothers et là aussi Justine et ses musiciens s’en tire à merveille pour y mettre du groove et nous livrer toutes les richesses de sa voix. Le défi est impeccablement relevé…
Avec No Filter on flirte avec le funk léger, tandis qu’avec I thought i was alone on évolue au fil d’une belle mélodie dans tous les registres de la voix de Justine du plus serein au plus puissant. L’album se termine sur un morceau très touchant quasiment engagé pour la défense des sans-abris, Fallin : la voix de Justine se charge d’émotions portés par les parties musicales et notamment des parties de guitare lumineuses.
Cet album est une véritable révélation unanimement saluée par la presse spécialisée : de bonnes compositions, des arrangements de haute volée une production soignée, une voix qu’il faut absolument découvrir tant sur disque que sur scène ou les occasions ne devraient pas manquer au cours de la prochaine saison de festivals, surtout quand on a un album tel que True comme ambassadeur de son savoir-faire.
*[NdlR : nous avions découvert Just in blues en 2018 au Jazz Club Saint-Georges puis à Cybèle]