Changement de décor voir de classe pour l’équipe de Jazz-Rhone-Alpes.com ce soir. Ce n’est pas dans un club ou un festival de jazz que nous nous retrouvons mais à l’Auditorium de Lyon pour entendre l’Orchestre National de Lyon. Oui Monsieur !
Dans le cadre de son week-end Percussions l’Auditorium présente une soirée spéciale avec au menu une composition de Stéphane Pelegri, bien connu de la scène jazz, encadrée par deux œuvres de deux compositeurs américains pionniers de la musique dite minimaliste John Adams et Steve Reich.
L’ambiance est plus solennelle ici, l’orchestre au grand complet est impressionnant le protocole aussi. Le premier violon, Jennifer Gilbert, arrive après tout le monde sous les applaudissements puis le chef d’orchestre Pierre Bleuse qui la salue ostensiblement. On va pouvoir commencer ?
Le courant minimaliste est apparu dans les années 60 aux États-Unis; les têtes d’affiche de ce genre musical sont Philip Glass, Steve Reich, John Adams et Arvo Pärt.
L’écriture musicale est basée sur le rythme et la pulsation. Ces pionniers introduisaient dans leur musique des boucles analogiques de sons divers bien avant l’apparition de nos « looper » numériques actuels.
« The chairmain dances » de John Adams, créé en 1985, sera le premier morceau interprété. La belle mécanique de l’orchestre nationale se met en action pour nous plonger dans une ambiance entêtante dans laquelle on serait resté bien au-delà des treize minutes annoncés. L’auditorium nous offre une qualité sonore idéale pour cet ensemble acoustique; moi, certainement mal habitué par les sons amplifiés, j’aurais volontiers déboutonné le nœud papillon et poussé le potentiomètre.
Pour l’interprétation de la création de Stéphane Pelegri, « Random Memories« , l’orchestre se modifie, les percussions en fond de salle disparaissent et les timbales apparaissent désormais au premier plan, prises en main par Adrien Pineau timbalier solo de l’ONL. La création s’articule en trois mouvements qui seront des dialogues entre les timbales et l’orchestre. J’y ai vu pour ma part un échange entre le sauvage et le civilisé. Le caractère tribal des percussions avec l’utilisation de maillets, baguettes, ballais…voir simplement des mains du musicien se confronte à l’élégance et au raffinement de l’orchestre: L’opposition du charnel et du spirituel.
Une pause permet à l’orchestre de se modifier encore pour la composition de Steve Reich » City life ». Le groupe musical est plus resserré et il est désormais amplifié. On y trouve quand même, entre autre, deux pianos et deux synthétiseurs, un technicien y est même accueilli pour les sons de la ville qui parsèment le morceau créé en 1995:Vingt minutes dans les rues de New York, rythmées par les klaxons, la sirène des pompiers les coups de freins. Steve Reich y a intégré aussi les échanges radio entre les pompiers de New York lors de l’attentat du World Trade Center de 1993. J’avoue ne pas les avoir entendu ce soir.
Contrairement à ses précédentes compositions, comme « Different trains » les sons enregistrés ne sont pas sur bandes magnétiques mais bien échantillonnés et joués en direct sur des claviers.
Une très belle expérience que d’entendre en live une telle œuvre.
C’est avec la banane au visage après ces moments d’exception qu’au sortir de la salle nous sommes accueillis dans l’atrium de l’auditorium par un trio jazz pur jus pour un « after » . Oui madame un « after » à l’Auditorium !
Aussi nous voici dans un contexte plus familier pour nous avec le trio jazz TNT à la manœuvre.
Benoît Thevenot est au piano, magnifique musicien bien connu aussi avec son autre trio Magnétic Orchestra. Greg Theveniau est à la guitare basse au bon son groove et au slap assassin. Hervé Humbert pilote la batterie avec beaucoup de créativité on le connait aussi pour sa participation au big band de l’Œuf. Ce qui est bon dans les soirées impromptues c’est que tout peut arriver ! Aussi comme Stéphane Pelegri a participé grandement à l’organisation de la soirée, il lance un bœuf en prenant place au piano, invite Gaby Schenke au saxophone et Arnaud Geffray (de l’ONL lui aussi) à la trompette et c’est parti sur un thème de Wayne Shorter et un moment de grande liberté et de pur plaisir pour les spectateurs.
La chanteuse jazz Catali Antonini viendra rejoindre ce bel équipage sur un thème chanté autrefois par Claude Nougaro (NdlR : Estate).
Les spectateurs avaient de quoi êtres comblés ce soir parce que bousculés, surpris et enrichis par la musique avec ou sans protocole.