11/04/2024 – Essor et chute (de notre civilisation) au festival Jazz en Avril à Roanne

11/04/2024 – Essor et chute (de notre civilisation) au festival Jazz en Avril à Roanne

Romain Baret compose une musique de film inexistant qui retrace l’histoire de l’humanité avant l’exode rural. On marche en masse vers la ville, bruyante et surprenante jusqu’à la découverte du pétrole, le développement de l’industrie et l’expansion du capitalisme, les guerres et crises qui en découlent.

Vous l’aurez compris, nous plongeons dans un monde parfois très bruyant, pas toujours harmonieux avec quelques moments de paix et de douceur. Les oreilles vont être chahutées, dérangées et réarrangées avec des musiciens de très grande qualité.

A la batterie Elvire Jouve prend une place importante avec un jeu époustouflant allant d’une grande finesse à un jeu énorme, jonglant sur ses cymbales, ses toms, très à l’aise et heureuse de nous faire partager sa vitalité débordante et sa précision à toute épreuve. Elle est vraiment la complice de Michel Molines à la contrebasse et à la basse électrique, beaucoup d’échanges entre eux et de rires tout en soutenant des rythmes parfois très complexes ; ils nous font profiter de très belles improvisations.

Un autre duo fabuleux est celui de Fanny Ménégoz aux flûtes d’une grande virtuosité, qui se lance sans hésiter dans des chorus délirants avec un son très chaud, jouant et parfois chantant en même temps, qui nous emmène dans des sphères musicales très agréables, et d’Eric Prost au saxophone ténor aux sonorités tantôt métalliques tantôt chaudes, dont la réputation n’est plus à faire.

N’oublions le maestro du groupe à la guitare et à la voix, Romain Baret, qui sait se faire discret tout en imposant sa musique et son univers musical très particulier dans ce projet.

Une présentation des musiciens surtout, car du spectacle nul n’en ressort indemne. L’Exode Rural débute donc le set, donnant le ton de la soirée, nous passons de tensions très grandes à des moments de détente bienvenus, de fortissimo à la discrétion, des improvisations de tout bord. Nous passons par A l’approche du point de bascule, avec des épisodes de guerre jusqu’au point de non retour où l’on teste de nouvelles choses tout en essayant de rester en contact les uns avec les autres ; le son de la guitare se rapproche du synthétiseur. Un morceau en hommage à l’important courant longeant les côtes européennes de l’Océan Atlantique, Ci-gît un Gulf Stream, dans lequel nous sentons que le courant nous emporte tous dans le même sens.

Le rappel est sans appel avec une petite lueur d’espoir pour terminer ce beau et dérangeant projet, toujours un jeu de contraste très fort entre légèreté et puissance qui nous a tenu en haleine tout au long du concert. Belle improvisation entre guitare et basse et chorus fortissimo d’Eric au sax. Bravo à Romain Bouez aux lumières qui maîtrise les effets en totale cohésion avec la musique, même si, aux dires d’un certain photographe présent dans la salle, les musiciens auraient pu bénéficier d’un peu plus de lumière pour les sortir de l’ombre. Le son était magistralement géré par Pascal Coquard qui a personnellement enregistré et mixé ce projet au studio des Tontons Flingueurs à Renaison.

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