23/05/2024 – Miasin au festival Jazz(e) à Montbrison

23/05/2024 – Miasin au festival Jazz(e) à Montbrison

Pour cette deuxième soirée du festival à l’église Saint Pierre de Montbrison, nous découvrons un groupe de cinq musiciennes et compositrices qui explorent les différentes identités culturelles de Turquie, d’Arménie et de France, et composent leur musique autour du droit des femmes. Miasin a été créé un mois avant le covid et ce soir est le dernier de leur tournée de printemps.

Elles bousculent les traditions en jouant des instruments médiatisés par les hommes comme le duduk, que maîtrise parfaitement Carole Marque-Bouaret, le saz, sous les doigts de Seval Eroglu et les percussions multiples sous les baguettes, mains et pieds de Ezgi Elkirmis.

Ezgi a une très grande présence, assise sur son cajun actionné par son pied droit avec une pédale de grosse caisse, un charley au pied gauche, une derbouka calée sur sa cuisse gauche et les mains qui volent d’une cymbale à l’autre, sur le daf ou autres petites percussions. Et j’allais oublier : elle chante, sourit et rit aussi.

Le concert débute sur un rythme très dansant avec Nine Steps, où se mêlent la clarinette par la spécialiste des vents Carole, le ukulélé basse sous les doigts de Caroline Cuzin, le saz, l’accordéon sous la houlette de Sevana Tchakerian et au chant Ezgi accompagnée par Sevana et Caroline, tout ça sur une cadence à neuf temps. Quelle belle entente, écoute et sensibilité de la part de ce quintette. Pour le morceau suivant, Apaga, qui signifie « futur » en arménien, Carole passe au duduk puis se lance dans un chorus à la clarinette suivie par une improvisation de percussions  vocales, rappelant le konnakol indien, de la part d’Ezgi. Surprise sur Aşk (amour en turc) écrit et chanté par Seval, avec un changement de place, Caroline passe au clavier et Sevana à la flûte, sur des graves jouées par la clarinette basse. Retour à leur poste pour Toute Seule, chanson en français composée par Carole qui commence avec un son très beau et grave au duduk souligné par des «sifflements» sous l’archet de Carline au violon, des sons graves à l’accordéon et des bruitages aux percussions. Le rythme rentre à la batterie, très carré à quatre temps, une mélodie s’installe au clavier et au violon et introduit le chant de Carole avec quelques interventions de Seval au saz avant que les quatre voix n’entrent dans la danse.

Nous partons dans la forêt et plus exactement la Jungle sur des bruitages collectifs avant d’embarquer pour un thème oriental au saz et duduk et le violon électrique à six cordes unique au monde de Caroline (invention d’un luthier qui lui a tout de suite plu), morceau qui se termine sur une improvisation magistrale de Carole à la clarinette.

Cette fois Ezgi passe au ukulélé basse, Sevana à la batterie et Caroline au clavier et à l’écriture, pour interpréter Bébé, thème frais et enfantin, berceuse au chant à quatre voix soutenues par la clarinette basse. Nous enchaînons avec une composition de Servan, DOĢAR, qui évoque les sentiments d’une famille en exil qui perd un être cher dans son pays natal, l’Anatolie centrale, sur des rythmes très syncopés  et un chant magnifique dans les aigus de Seval .

Tout le monde revient à son poste sur une composition de Carole, Nasip , en hommage à son grand-père disparu, guide spirituel dont les pensées l’accompagnent toujours depuis leur premier voyage à Istanbul. Le violon à six cordes sonne tel un violoncelle, les voix se mêlent sur les refrains et  les paroles sont en français. Kimileri nous entraîne dans la danse avec un chorus endiablé de Caroline au violon.

Le groupe lors d’une tournée, sorte de voyage initiatique, a traversé l’Arménie, la Turquie, la Géorgie et rencontré des musiciens notamment des kurdes à Diyarbakir. Miasin a appris un de leurs chants, Tel Zendan, aux cadences entraînantes. Toute l’église frappe dans les mains sans se faire prier puis chante avec grand plaisir les «lélélé» proposés par les chanteuses qui sont vraiment heureuses de cette participation sans contrainte du public.

Nous finissons ce merveilleux concert sur Miasin,qui veut dire « ensemble » en arménien, très folklorique sur lequel  Sevana présente toutes ces belles femmes passionnées qui improvisent chacune à leur tour avec leur énergie et leur sensibilité. Les spectateurs chantent «Miasin» sur les refrains et applaudissent chaleureusement en se levant.

Bien entendu toutes les musiciennes reviennent avec joie pour Rêver en rappel. Thème très dansant qui libère toute l’énergie et le bonheur d’être là et de jouer ensemble dans ce lieu insolite pour elles qui n’avaient jamais joué dans une église auparavant.

Encore une très belle soirée féminine entre jazz, folklore, fusion où tout le monde s’est laissé envoûter par cette musique partagée par un public attentif et comblé.

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