ASBA #3 : LA MARQUE PHÉNIX QUI RENAIT DE SES CENDRES !
Nous avions pris date avec Thomas Millo de la team ASBA lors du concert du Trio Temime au Hot club le 11 octobre au cours duquel Simon Goubert avait testé la nouvelle jazzette qui va être mise à disposition du club (voir ici), pour une visite de la fabrique de batteries lyonnaise qui a connu une renaissance grâce à ces quatre passionnés que sont Thomas, Léo, Jean-Marc et Benjamin ; quatre garçons dans le vent qui sont en passe de réussir leur pari audacieux la reprise audacieuse de cette fameuse marque historique française…
Mais, commençons par le commencement… Et par un peu d’histoire : en 1927, Alfred et Simone Boudard fondent la marque qui au départ propose plutôt des accessoires pour trompettes (sourdines par exemple), mais également des pupitres. La fabrique ferme durant la Seconde Guerre mondiale pour renaître avec les nouvelles esthétiques musicales apportées par les Américains, et dès lors les demandes de matériel se font davantage en direction des batteries et des percussions. Qu’à cela ne tienne, ils se lancent et le succès va grandissant. La fabrique implantée alors en région parisienne comptera jusqu’à 50 ouvriers et ce sont les neveux du couple fondateur qui portent l’entreprise sur les fonts baptismaux : les Beatles ont joué sur des congas ASBA, la pédale de grosse caisse « Caroline » est popularisée par le batteur du trio d’Hendrix Mitch Mitchell, Claude François (ex-batteur)à utilise le matériel ASBA pour faire le zazou sur scène, et on en passe et des meilleurs ! Dans le monde du jazz, Jack de Johnette a joué sur une ASBA ainsi que Daniel Humair, qui a même eu une batterie signature à son nom. ASBA est également connue pour la conception d’accessoires, « Hardware » comme on dit, comme le pied perche, le tilter, et plein d’innovations techniques qui en font un acteur majeur de la batterie bien en dehors des frontières de l’Hexagone… Mais en 1983, c’est la faillite, la faute à la concurrence japonaise impitoyable et à un management sans doute pas très efficient.
En 2017, la marque est reprise et un certain Thomas Millo y pensait déjà… Mais il ne fera le grand saut seulement il y a un an et demi avec ses trois compères via des enchères et l’installation de l’atelier à Lyon, d’abord à la Croix-Rousse puis dans le 7ème arrondissement. Dès le départ, ils recherchent et obtiennent la bénédiction de « la Baguetterie » et de nombreux magasins de batteries démarchés par les repreneurs d’ASBA sont séduits immédiatement par la stratégie des quatre lyonnais qui ont des arguments pour améliorer leurs marges (ASBA ne fait plus de vente en directe), et propose une approche collaborative qualitative et personnalisée. C’est la force de cette Team ASBA #3 : la proximité et la relation humaine, l’attention pour ses partenaires, ses artistes et ses clients. Et surtout, ASBA new génération est attentive à tous les détails de la fabrication de la batterie et celle-ci est française à tous les stades. Pas étonnant dès lors que les batteurs nouvellement endorsés se multiplient, à l’image de celui des Fatals Picards, Deluxe ou Orange Blossom. Côté modèle économique, la marque est une Scop qui permet une gestion collective et un partage des risques à égalité de ses fondateurs.
Lorsque nous pénétrons au 38 de la rue Chalopin, dans ce 7ème arrondissement d’origine populaire, mais qui se gentrifie à vue d’œil, nous passons sous le porche d’entrée pour déboucher dans une charmante cour juste avant de pénétrer dans l’antre de l’atelier/ hangar. Tout de suite ce qui frappe dans ces 400 m² sur deux plateaux, c’est l’atmosphère chaleureuse et décontractée, avec un beau bar en formica, des vespas anciennes (un des talentueux ouvriers Jean-Marc a fait des courses de « Guêpes » dans le passé), un jeu de fléchette (qui sert à l’équipe à départager les tâches à accomplir !), et de magnifiques établis qui sont présentés par un Thomas plus passionné que jamais, qui au détour de la conversation nous confie qu’ASBA est le seul à produire ses fûts sur place, et qu’il a racheté le bois qui appartenait jadis à Jacques Capelle, un autre fabricant de batterie française, mais qui n’a pas réussi à passer le cap des années. Ici le bois provient de la région lyonnaise et les fûts en inox viennent de Bonson près de Saint-Etienne (cela ne s’invente pas !). Au premier étage, la production de fûts et bientôt un stand photo va voir le jour. Au-rez-de-chaussée, il y a le travail avec les différents plis de bois ; l’assemblage des différents types de bois, l’alternance de plis, l’encollage à froid, puis le démoulage des fûts. Ils sont autonomes sur leur production et utilisent une visserie en inox pour éviter le vieillissement, car chez ASBA, on a le souci de produire des batteries durables qui ne bougent pas dans le temps ! Les bois sont aussi des bois issus de forêts gérées dans un souci écologique. Et dans l’atelier, partout où l’on pose son regard, il y a des petits objets sympas, des clins d’œil au passé de la marque, de l’humour, c’est aussi tout cela qui caractérise cette troisième génération ASBA.
Contigu à l’atelier il ya la cabine/ Showroom qui ferait rêver plus d’un batteur avec les modèles à essayer et leurs brevets originaux, à l’instar de la fameuse pédale « Caroline » (ils ont produit une réplique du fameux modèle) ou du « Toplog » sur la caisse claire qui a été inventé par Thomas Millo himself ! Décidément le créateur de la marque iconique RLRRLRLL a plus d’un tour dans son sac à baguettes…Il pourrait bien d’ici à trois ans sortir un livre sur l’histoire d’ASBA dans le cadre du centenaire de l’entreprise…
Mais si dans le monde de la batterie, c’est un peu David contre Goliath, gageons que le modèle lyonnais fait d’excellence, d’innovation et de dynamisme remportera de nombreux succès et sera en mesure de se hisser tout en haut des marques de batteries comme un modèle inspirant. Et s’il est vrai comme il se dit dans l’adage populaire, que l’avenir appartiendrait aux audacieux, nul doute que nos quatre compères lyonnais voguent vers un futur radieux. La marque « Phénix qui renait de ses cendres », qui possède d’ores et déjà le label « Fabriqué à Lyon » cherche des investisseurs et des partenaires, tenez-vous le pour dit ! Le B.A.-BA de la batterie rime désormais avec ASBA. Amis batteurs, vous qui lisez ce reportage de Jazz-Rhone-Alpes.com, sachez que l’entrée de gamme pour l’acquisition d’une de ces merveilleuses batteries se situe aux alentours de 1800 €. Avouez que c’est donné pour rentrer dans la légende…
Pour prolonger la visite : https://www.asbadrums.com/