
Pour clôturer cette vingt-cinqième édition du Saint-Fons Jazz Festival, l’école de musique Guy Laurent et l’équipe organisatrice avait sollicité la compositrice, cheffe d’orchestre et pianiste Leïla Olivesi venue ce soir à la tête d’un fringant quintet où l’on retrouve trois musiciens de ses récents projets : le guitariste Manu Codjia , le saxophoniste Adrien Sanchez, le contrebassiste Yoni Zelnik renforcés ce soir du brillant batteur Gautier Garrigue (déjà présent à la soirée Trio Pieranunzi de la veille).
Auréolée de la reconnaissance reçue pour son dernier album en date Astral (prix Django Reinhardt de l’Académie du Jazz 2023), Leïla Olivesi ouvre naturellement le concert avec ce titre éponyme qui débute également l’album. C’est une invitation au rêve et au voyage dès les premières notes de piano vite enchainées avec de superbes lignes de sax et qui débouchent sur un dialogue nourri avec la guitare. Début de concert très prometteur suivi d’un titre hommage à Wayne Shorter Wayne left town où tout à fait naturellement se loge un chorus de sax d’Adrien Sanchez très appuyé et salué par un public connaisseur. Pour continuer, Leila Olivesi a réservé au public du Saint-Fons jazz, une composition en avant-première d’un album à enregistrer prochainement Un jour le silence où une nouvelle fois éclatent de délicieux échanges piano, sax et effets de guitare ; on savoure les silences et les enchainements ! C’est Gauthier Garrigue qui ouvre le morceau suivant Africa queen avec un éclatant chorus de batterie où finit par s’immiscer tendrement le piano suivi par quelques riffs de guitare et de lignes apaisées de sax. Le concert continue avec une ancienne composition Aurore déjà enregistrée avec Manu Codjia et qu’elle souhaite réenregistrer prochainement avec les paroles d’un poème de sa mère. Pour cette suite, Adrien Sanchez passe à la flûte et Manu se déchaine sur le bas du manche de sa guitare jusqu’à l’ovation du public pendant que de son côté Leïla semble savourer les instants de grâce que lui apportent ses musiciens.
Autre nouveauté, jamais jouée, avec comme titre Nouakchott Budapest, encore une évocation de voyage où la compositrice s’est attachée à chercher les correspondances existantes entre les musiques populaires hongroises et mauritaniennes. Retour vers l’album Astral avec le morceau phare, Black Widow et une belle intro au piano avant l’arrivée du sax velouté et très présent d’Adrien Sanchez et d’un chorus appuyé de la contrebasse de Yoni Zelnik. Pour le final, le voyage continue en se chargeant de teintes brésiliennes avec le titre Le tour du monde où Adrien Sanchez retrouve sa flûte pour la chute sereine et apaisée d’un grand moment musical.
Tant le plaisir des musiciens à jouer est évident que le public n’aura pas de mal à imposer deux rappels conséquents dont le premier New York en hommage à Léopold Sedar Senghor avec la participation active aux chœurs du public du Théâtre Jean Marais invité à chanter : « Tam, tam song et tam tam ». Pour le deuxième rappel ce sera un hommage à la Corse L’ile de beauté qui prend tout son sens ici, après la précédente évocation de Nouakchott quand on sait que le père de Leila est d’origine mauritanienne et sa mère corse. Pour aujourd’hui, la boucle est bouclée mais il reste encore beaucoup de choses à dire et de voyages musicaux à proposer dans le futur pour cette compositrice intarissable et inspirée qu’est Leïla Olivesi.