
Nous voici à deux pas de Roanne, dans un lieu convivial, la Pépinière pour accueillir COB Trio. Le programme du festival est résolument éclectique et le jazz de cette soirée est surprenant et toujours de très bonne qualité musicale.
Le premier morceau, Attrape moi, est une composition d’un ami de Patrice Boccabella qui l’a écrit dans l’esprit de fuir la tonalité, ce qu’il réussit fort bien d’ailleurs avec des harmonies bizarres, une musique décalée, de très belles improvisations élaborées autant de Patrice au piano que de Pierre-Yves Côte à la contrebasse.
Si je n’avais pas su que nous partions dans Urgences, je l’aurais un peu imaginé en entendant une note sur deux, toujours la même, telle le « pin-pon » de l’ambulance, sur le manche de la contrebasse. Nous revenons à une musique plus mélodique. Yvan Oukrid à la batterie est très présent tout en restant très discret et s’adapte parfaitement aux humeurs des musiciens lors des improvisations.
Le standard suivant, Caravan, introduit par Yvan sur un rythme très rapide nous démontre leur capacité à accaparer des thèmes connus pour les explorer et les rendre tellement déconcertants, un tempo doublé sur le thème A (composé par Juan Tizol, le reste du l’écriture est complétée par Duke Ellington), des décalages rythmiques subtils.
Place à une création de Pierre-Yves, Andia, introduit par la contrebasse sur une pulsation ternaire dansante. Le thème est très beau et parfois j’ai l’impression d’entendre le refrain de la java bleue mais peut-être n’est-ce que mon esprit qui se laisse manipuler par cette douce et belle mélodie. L’improvisation de Pierre-Yves tourne joliment autour du thème et Patrice se lance dans un chorus très aérien.
Retour à une composition avec Résilience, ballade à la carrure bizarre et un solo (terme volontairement choisi car il joue seul) de contrebasse où tout le public est suspendu à ses doigts. Il part sur une allure plus soutenue qui donne le départ à la batterie.
Nous continuons avec des standards ; Time Remembered (Bill Evans), Israel (John Carisi) sur un tempo hyper rapide et un solo de piano rappelant Hiromi.
Lonely Woman (Ornette Coleman), introduit par Yvan qui joue avec la gravité en laissant tomber ses baguettes sur les toms pour un rebond extrêmement intéressant. Nous sommes dans une carrure vraiment spéciale, des accords très décalés et nos trois musiciens partent dans un délire général. Patrice nous avoue avoir mélangé une rythmique de manga au thème original, ce qui explique la difficulté à s’y retrouver.
Coltrane est cité avec Giant Steps, interprété en 7/8 sur une pulsation fulgurante, suivi d’une ballade pour ramener un peu de calme, Bill Evans écrit par Lyle Mays.
Nous terminons sur un thème de Ornette Colleman, Turnaround ; le piano expose le thème avant que chaque artiste ne se lance dans un chorus.
Un trio à découvrir pour ouvrir nos horizons musicaux autour de compositions et de standards remodelés à leur manière avec sensibilité.