02/10/2025 – Naoko Sakata à la Chapelle de la Trinité pour le RhinoJazz(s)

02/10/2025 – Naoko Sakata à la Chapelle de la Trinité pour le RhinoJazz(s)

Nous voici donc dans la magnifique Chapelle de La Trinité, en plein cœur de Lyon pour un des concerts rhodaniens du Rhinojazz(s). Ludovic Chazalon, directeur artistique du festival, qui nous accueille avec François Mardirossian, un des « maîtres » de la programmation de cette chapelle, nous indique que ce concert est son « coup de cœur » de cette quarante-septième édition, tout en nous précisant que « l’émotion est le cœur de nos histoires musicales ».

Ce magnifique écrin, même si la chapelle a été désacralisée, est parfait pour accueillir Naoko Sakata qui se présente près du piano. L’artiste nippone, qui réside en Suède, nous émerveille d’entrée avec sa présence : son visage souriant avec une bouche très rouge et deux rangées de cils surdimensionnés sous des paupières noircies et pailletées est encadré d’une longue chevelure dans les dégradés verts finissant en gris, qui aura son importance… Ses déplacements sont magnifiés par un long manteau ample et soyeux à l’imprimé pastel.

Elle s’installe au piano, reste un long moment concentrée, très droite et on se demande si elle prend possession du piano ou si celui-ci va prendre possession de l’artiste ?

Lorsqu’elle commence à jouer, sa chevelure devient une espèce d’accompagnement d’une transe chantée indéfinissable mais tellement intense…

A la fin de la première pièce, elle remercie d’une petite voix fluette qui contraste avec le morceau joué. Elle entame une improvisation calme qui devient vite orageuse, elle semble communiquer (avec qui ?) en levant les yeux au ciel, pousse des cris stridents, ses chants semblent incantatoires. Le morceau suivant débute encore dans le calme puis se transforme en « foudre sonore » impressionnante. Une petite musique gaie, aiguë, les yeux levés au ciel, la chevelure tremblante, l’artiste tape des pieds, sautille sur son siège, semble toujours « guidée » et nous offre avec rapidité et rage une œuvre déchaînée ponctuée de cris stridents.

Elle finit généralement toutes ses improvisations d’une manière abrupte. Elle nous offre aussi des mélodies douces et délicates, et termine son concert par une fin apaisée. Elle revient, toujours en souriant et en courant, comme si elle avait oublié de nous dire quelque chose. Elle demande à l’organisation de couper l’amplification afin de terminer son concert en acoustique intégrale. Elle sourit, remercie toujours de sa petite voix qui peut contraster avec son jeu, et entame un ultime morceau aigu, elle tape du plat de la main, avec ses bras entiers sur le clavier, semble chercher l’inspiration et rentre dans son « personnage », secoue sa chevelure comme dans plusieurs moments du concert en spasmes violents, tape du pied, joue très vite, les notes se multiplient… et STOP ! Elle s’arrête de jouer…

Les musiciens présents évoquent Keith Jarrett, Sun Ra… mais est-ce le principal ? Les auditeurs et spectateurs ont surtout vu et entendu une belle artiste, talentueuse, inclassable, qui communique peu avec le public, là où d’autres sont diserts, mais en revanche, nous prend par la main, les yeux et les oreilles pour nous emmener dans son monde…

Son dernier album, qu’elle a enregistré d’une traite, comme les improvisations de ce soir, s’intitule Infinity… Tout est dit !

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