
C’est avec la manière que s’est terminée dimanche la quarante-septième édition d’un RhinoJazz (s) qui, manifestement, a fait le plein de plaisir(s) et de public. Ludovic Chazalon a de quoi être ravi avec un taux de remplissage qui se monte à 75% ou 80% (chiffres à venir), des moments particulièrement beaux, tels ceux vécus avec Cynthia Abraham à Villars ou Donny Mc Caslin au Panassa, un Opéra pratiquement rempli avec Scott Bradlee’s, des spectateurs contentés et, surtout, un Rhino à la carnation musicale panachée.
Du panache, mais en un sens différent, c’est ce qui ressort du concert donné par le pianiste Pierre-François Blanchard et le clarinettiste et saxophoniste Thomas Savy. Dans un Solar bondé, on ne savait pas au juste à quoi s’attendre. Jazz, musique classique et romantique du XXème, disait une plaquette qui parlait aussi de nomination aux Victoires du Jazz 2024 et de coup de cœur de l’Académie Charles Cros. Alors ?
Alors silence, écoute, élégance. En une heure trente, ils ont interprété neuf titres, pratiquement tous glanés dans « Puzzled », le premier album que Pierre-François Blanchard a publié sous son nom, sorti en février 2024. D’accord, mais un puzzle de quoi ? Disons qu’en réunissant toutes les pièces, on obtiendrait un tableau de maître(s), la vanité en moins. Cela a débuté avec Asmara, une envolée mélodieuse de notes célestes au clavier, posées dans l’espace sur celles, toutes aussi douces, de la clarinette basse. Ah oui, c’est vrai, par moments certaines sautillaient, ça faisait gosse, on souriait. Se sont succédé Fears, «des angoisses dont le pianiste voulait nous faire profiter », C’est par où, une petite historiette aux allures cartoon, La lettre aux ruptures harmoniques comme autant d’alinéas improvisés. Une mention aussi pour Pré Vert, en hommage à Pierre Barouh dont Pierre-François Blanchard fut le compagnon d’âme pendant cinq ans, un titre à la fois grave et joueur. Pour le rappel, c’était Backtrack, « la mélodie préférée de Thomas », un espace musical nappé de volutes arabisantes, lentissimo.
Alors encore ? Dans ce premier album, ce premier pas vers la confiance, ce duo d’experts aussi délicat que spontané conte et compte beaucoup. On peut ne pas entrer dans le projet, y chercher d’autres émotions, y chercher tout simplement des émotions. Pourtant, cette virtuosité, mêlée au détachement ludique avec lequel les deux musiciens font assaut de notes idéales, incite à un imaginaire pluriel. Sans parler des chaussettes admirablement bariolées de Pierre-François.
Du panache, on vous dit!